Sylvain Forges, récent lauréat du prix Quai des Orfèvres 2018 avec « Tension Extrême », répond aux questions de l’interview du trophée Anonym’Us.
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Votre premier manuscrit envoyé à un éditeur, racontez-nous ?
Comme beaucoup d’auteurs en herbe, j’ai essuyé beaucoup de refus avant de trouver un petit éditeur qui accepta mon texte. C’était à compte d’éditeur, je tiens à le préciser. Le seul problème, c’était l’absence totale de promotion et de diffusion. Les livres étaient en ligne et c’est tout. Depuis, les droits ont été repris par les Éditions du Toucan et l’ouvrage, pratiquement réécrit a eu une nouvelle vie ; aujourd’hui, j’ai même le plaisir de le voir nominé pour un prix prestigieux.
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Écrire… Quelles sont vos exigences vis-à-vis de votre écriture ?
Une bonne histoire (je vais en parler un peu plus loin), d’abord et surtout. Ensuite : un style honorable qui ne gâche pas le récit, surtout. Je m’efforce d’avoir une plume fonctionnelle, je ne prétends pas au style.
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Écrire… Avec ou sans péridurale ?
Ma femme a accouché de jumeaux et par respect pour ses efforts, je n’emploierai pas le terme de péridurale ici, écrire n’est quand même pas aussi douloureux 😉 Mais c’est parfois difficile, en effet. Je considère qu’écrire est véritablement un travail, un métier. C’est ainsi que j’aborde la chose.
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Écrire… Des rituels, des petites manies ?
J’ai mon stylo fétiche qui me sert à prendre des notes dans un gros carnet, c’est ma boîte à idées. Sinon, j’écris où je peux, quand je peux, souvent avec des bouchons dans les oreilles.
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Écrire… Nouvelles, romans, deux facettes d’un même art. Qu’est-ce qui vous plaît dans chacune d’elles ?
Ce que j’aime avant tout — quel que soit le format retenu — c’est raconter des histoires ; c’est un noble art, indispensable aux hommes, comme en témoignent les peintures rupestres et tout ce qui a suivi, jusqu’aux séries américaines, en passant par les contents de fée. Une histoire nous aide à vivre. Voilà pourquoi les déportés écrivaient de la poésie ou lisaient Victor Hugo ! Quand on pense que la 7e saison de Game of Throne a été piratée 1 milliard de fois… les hommes veulent des histoires. Encore faut-il raconter de bonnes histoires. C’est là que le métier d’auteur est passionnant.
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Votre premier lecteur ?
Ma compagne, attentive aux fautes, longueurs et incohérences de tout poil.
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Lire… Peut-on écrire sans lire ?
D’un point de vue technique, certainement. Mais pour ce qui est d’écrire un livre publiable, je ne vois pas comment il est possible d’écrire sans lire de concert. Dans le domaine du polar, où tant de choses ont déjà été écrites, innover implique de mettre en place de bons mécanismes dramaturgiques qu’on ne peut s’être bricolés qu’après avoir lu la prose des autres.
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Lire… Votre (vos) muse(s) littéraire(s) ?
Pas de muse, mais de nombreux échanges avec une amie toulonnaise, Isabelle, qui m’a inspiré un personnage féminin et récurrent dans 3 de mes livres : Isabelle Mayet.
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Soudain, plus d’inspiration, d’envie d’écrire ! Y pensez-vous ? Ça vous est arrivé ! Ça vous inquiète ? Que feriez-vous ?
Le manque d’inspiration, je connais parfois ça au milieu d’un récit, entre deux scènes. Il me manque quelque chose pour raccorder deux maillons de mon histoire. Une seule chose à faire : prendre du recul, ne pas paniquer, laisser l’inspiration revenir en gardant un carnet et un stylo à portée de mains. Je touche du bois, l’inspiration est toujours revenue.
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Pourquoi avoir accepté de participer au Trophée Anonym’us ?
Parce qu’il devient de plus en plus renommé, parce qu’écrire des nouvelles m’apprend à synthétiser mes histoires : un bon exercice pour moi, toujours tenté par les intrigues chorales et labyrinthiques. Parce qu’il y a des auteurs de prestige dans la liste des participants.
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Voyez-vous un lien entre la noirceur, la violence de nos sociétés et du monde en général, et le goût, toujours plus prononcé des lecteurs pour le polar, ce genre littéraire étant en tête des ventes?
Les enfants adorent avoir peur avec les histoires de sorcière et sans doute que les adultes aussi. Mais l’explication est sans doute à chercher du côté des femmes : selon les études, 70 % des lecteurs seraient des lectrices… de polar pour la majorité d’entre elles. Elles cherchent la transgression et le frisson, tout en restant assises dans leur fauteuil. Peut-être que la littérature blanche est devenue nombriliste et que le polar, quant à lui, n’a pas renoncé à raconter des histoires. Les histoires… toujours.
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Vos projets, votre actualité littéraire ?
Un polar cet automne qui fera suite à « Un parfum de soufre » paru il y a quelques années aux Éditions du toucan.
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Le (s) mot(s) de la fin ?
Écrire et faire publier des textes, voilà une tâche bien ardue quand on travaille toute la semaine et qu’on est papa d’une famille nombreuse, mais quel bonheur ! J’espère avoir un jour plus de temps pour écrire et surtout continuer à tenir la plume le plus longtemps possible.