La première fois que j’ai lu Eric Calatraba, j’ai été engloutie par sa prose, sous le charme de son écriture… La nouvelle Au fond de l’Eau du trophée Anonym’us était de lui: je l’ignorais alors.
Je viens de terminer son roman Haïku.
Et j’ai ce comportement étrange assez révélateur chez moi.
Depuis trois jours, je le traîne partout. Il est dans mon sac à main, sur ma table de séjour, sur mon lit, et je me surprends à aller picorer dedans des passages qui m’ont touchée… Je ne le lâche pas, alors que je l’ai terminé.
Oui, vous l’aurez compris: ce livre m’a plu. Beaucoup.
Non seulement parce que c’est un excellent polar, selon moi, mais aussi parce que la plume d’Eric est juste, belle, passionnante et maîtrisée. Et qu’à un rythme effréné, voire haletant par moment, il ajoute des références culturelles qui donnent au récit une certaine profondeur.
Raphaël est un homme aux multiples blessures, expert en Arts Martiaux, maniant le katana avec dextérité, féru d’opéras et de motos grosses cylindrées.
Ivan est un homme aux multiples blessures, expert en Arts Martiaux, maniant le katana avec dextérité, féru d’opéras et de motos grosses cylindrées.
Des « jumeaux » que tout semble opposer pourtant…
L’un est flic. L’autre pas.
L’un veut rendre la justice. L’autre veut rendre la sienne…
Je ne vous dévoilerai rien de l’intrigue si ce n’est:
Les airs d’opéras qui ponctuent le récit et qui ont une importance capitale tout au long de l’intrigue.
Les meurtres violents à travers l’Europe. Très violents. Chacun est signé d’un haïku, petit poème japonais si particuliers. Les mafias russe et chinoise se côtoient, semblant batailler pour savoir laquelle sera la plus monstrueuse et inhumaine. Des politiques détestables et verreux. Un trafic d’organes à vous donner des nausées et à fermer les yeux lors de certains passages:
« Regardant le liquide ambre dans son verre, il énonça pensivement un proverbe corse:
A chi compra, à chi vende.
Il y a toujours des gens pour vendre, d’autres pour acheter. »
Au milieu de ce déchaînement de violences, Raphaël et Ivan. Ils vont s’observer sans se voir. Essayer de comprendre l’autre sans se connaître. Se toiser et se tourner autour à des milliers de kilomètres l’un de l’autre. Défier les lois de la vitesse sur leurs montures d’acier. Plonger aux tréfonds de leurs âmes pour se donner du courage. Avec dans une main, un katana et dans l’autre la conviction de faire le bien. Ou le mal. Pour des raisons différentes.
Parce que c’est la question essentielle de ce roman. La bataille entre le Bien et le Mal. Qu’est-ce qui est bon et qu’est-ce qui ne l’est pas au final? Nous renvoyant à notre propre conception des choses. Notre façon de les appréhender.
Eric Calatraba ne se contente pas de nous emmener à travers son récit en citant et traduisant des grands airs d’opéra, en faisant référence à l’Art Contemporain ou à des films d’action…Non… Il nous prend aussi par la main et nous pose devant Maître Nakamura, sur le Mont Kurama, avec délicatesse mais nous infligeant ainsi une gifle monumentale. L’enseignement que celui-ci prodigue à Raphaël est vertigineux. Nous obligeant à ponctuer notre lecture de ces pauses destinées à souffler ou relire un passage. Le temps d’une lecture, nous devenons son élève. Un élève à qui l’on insuffle des évidences et des vérités cachées au fond de nous. Cette philosophie ancestrale secoue ceux qui comme moi, sont persuadés avoir les réponses à leurs questions en eux. Mais que la peur, le doute ou les certitudes erronées empêchent de voir. Vous devenez alors Raphaël; ou Beatrix Kiddo pour les fans de Tarantino. Et c’est troublant.
» Mais c’est impossible, je vais tomber. (…) « Bien sûr que vous allez tomber, puisque vous en êtes persuadé. »
« Il perçut la puissance infinie de l’esprit et comprit que la seule limite à notre pouvoir était la somme de nos doutes et de nos peurs. »
Le face à face final, si vous ne l’aviez pas encore été, vous ébranle fortement. Le « Dies Irae » de Mozart résonnant magnifiquement… Une multitude de questions défilant alors à la vitesse de la puissante Hayabusa. Celle qui laisse la gomme de ses pneus sur l’asphalte brûlant, faisant exploser toute idée manichéiste dans le vrombissement de ses accélérations. Qui a raison, ou pas? Et nous? Qu’aurions-nous fait à sa place? A leur place? Aurions nous pardonné? Serait-on allé jusqu’au bout de notre décision? Comment peut-on savoir que notre choix est le bon? A chacun de voir…
Raphaël et Ivan sont à leur façon notre part lumineuse et notre part obscure. Ils ne me quittent pas depuis 3 jours.
C’est sans doute pour cela que « Haïku » n’est jamais très loin de moi.
A lire ABSOLUMENT.
Disponible ICI aux Editions du Caïman
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Eric, tu as peut-être lu quelques uns de mes articles et tu as vu que je n’étais qu’une toute jeune novice en matière de polars. Tu m’as cependant envoyé ton livre et décidé de me faire confiance. Je t’en remercie infiniment.
Tu connais mes émotions, je te les ai écrites. Tu sais qui me manquera dans la suite…
Nath.
Merci beaucoup pour ce retour de lecture. J’écris actuellement un nouvel épisode avec les mêmes personnages.
Oh ben merci à toi!!!! Un magnifique moment de lecture…
Quelle bonne nouvelle!!! Hâte de la lire cette suite!!!!
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