Lundi, j’ai pris une grave décision.
J’ai longuement réfléchi, pesé le pour et le contre, retourné le problème dans tous les sens. J’ai échafaudé des hypothèses, envisagé différentes solutions et analysé froidement la situation. Oui, lundi, après avoir ruminé durant des heures comme une vache (à qui on aurait fait bouffer un Malabar juste pour se marrer), après avoir dressé un drôle de constat plutôt amer, après avoir fait le tour de la question en long, en large et en travers, oui, ce lundi, enfin je me décide, je franchis le pas, je franchis le cap, je me jette à l’eau, je me jette aux lions, je plonge, je ma lâche, j’ose.
Je vais rédiger une petite annonce pour trouver l’âme sœur.
Après tout, je suis pas plus con qu’un autre et comme j’ai horreur des rencontres informatiques qui me rappellent la foire aux bestiaux, je décide de jouer la carte de la tradition, comme une bonne vieille méthode champenoise. Oui, oui et oui, je vais passer par les petites annonces! C’est peut-être un tantinet désuet certes, mais ça donne un charme plutôt classieux à la démarche.
Lundi soir, convaincu comme pas un, je me dis que j’ai déjà escaladé la moitié du chemin. Me reste plus qu’une chose à faire: l’écrire.
Alors mardi, je prends ma plus belle plume- un bic que j’ai eu à mon anguille de garagiste après une vidange, des plaquettes de frein, un cardan et un train de pneus- ce joli stylo du garage Luigi Di Truando, quelques feuilles blanches et je démarre la rédaction de mon profil, en choisissant le meilleur:
« Prince de sang bleu, du haut de ses trente-huit printemps, téméraire et loyal, à l’armure solide mais à l’épaule accueillante, cherche le donjon de sa future Princesse, cette jeune fille au visage angélique, Marquise de l’Amour, pour la délivrer des mornes plaines quotidiennes et la dérober au détour d’un tapis persan, en la cachant au creux de mon cœur battant, pour l’emmener sur les chemins du destin heureux, gorgés de pétales de roses veloutées, vers le paradis des sentiments éternels ».
Là, je sens que je frappe un grand coup!
Et puis, après une seconde voire une troisième relecture, le doute m’assaille: j’en fais pas un peu trop, là?
Je laisse alors reposer l’affaire. Je sors mes chats, m’octroie une séance de gymnastique Sport Elec devant Sophie Davant et songe à effectuer peut-être quelques retouches à mon annonce afin de la rendre plus…abordable.
Mercredi, alors que je pense déjà au futur vainqueur possible du Tour de France, à ma fin de droits Assedic et à ce que je vais manger ce soir, je décide malgré tout de reprendre à zéro mon annonce de la veille. Dans le fond, soyons naturel, glamour et réaliste à la fois. C’est quand même pas bien sorcier, bordel. Je retrouve mon stylo de garagiste que Chantal, une de mes chattes, avait planqué dans sa litière et redémarre ma proposition matrimoniale:
« Homme, la quarantaine, bien sous tous rapports cherche femme aimant la vie, la nature, le sport, la tartiflette, les jeux vidéos, les promenades et les chats pour partager des moments tendres et complices, dans la joie et la négresse ». (Après tout, un peu d’humour ne fait pas de mal, bien au contraire).
Content de moi, je recopie ma prose sur le bordereau du journal prévu à cet effet.
Mais à nouveau, le doute m’habite et mon couteau, suisse, me servant à décapsuler mes canettes de bière rend l’âme. Un signe? Je ne suis plus sûr de rien. Parais-je trop tortueux au travers cette annonce? Pas assez clair? Ou aussi stérile que Mafiote, mon angora castré?
Je m’endors en imaginant le CV idéal, véritable aspirateur à gonzesses, faisant de moi le coup du siècle qu’on vient à peine de démarrer…
Du coup jeudi, je décide d’aller droit au but. Plus de préliminaires. Du direct, du vrai, de l’authentique. Les femmes aiment les hommes qui ne tournent pas autour du pot. C’est bien connu. Alors je fais mon Bad boy, mon tatoué, le dur, le vrai. Je reprends mon bic de garagiste (?!) et entame mon ultime présentation, sincère et sans tralala:
« Homme 45 ans, en pleine force de l’âge, cherche compagne féline à dompter pour numéros à deux, sous le chapiteau de la vie ».
Précis, concis, redoutable.
Je fais appel à un ami, Pierrot, employé municipal au cimetière de mon village, pour avis de spécialiste. Et en sa qualité d’expert, après ses quatre mariages et pensions alimentaires, son célibat de douze ans et son alcoolisme de douze ans, il émet l’avis suivant:
« C’est de la merde ton truc… »
Patatra! Je redeviens sceptique et ça fausse tout. Si Pierrot le dit…ça doit être vrai. Du coup jeudi soir, je me couche contrarié, gagné par la désagréable impression de m’enliser dans mon projet…
C’est pourquoi aujourd’hui, vendredi, résigné mais lucide,sur les conseils avisés de mon camarade, j’abandonne l’idée des petites annonces pour un abonnement à Meetic. L’évolution de la nature humaine et des relations à cent à l’heure de notre époque ont eu raison de moi. Au milieu de la jungle internet, je glisse furtivement les éléments de mon profil en pleine face d’écran. Le choix du pseudo? « Anaconda59 ». Why not? Puis griffonne les quelques lignes de présentation:
« Beau mâle, monté comme la face nord du Mont Blanc cherche sa femelle en rut pour bivouacs vertigineux »
C’est pas mal… En plus Pierrot, qui a le don de lire l’avenir dans les poils de chatte, m’a dit en caressant Chantal entre deux pastis:
« Chez toi, ça transpire l’amour et je sens que ça vient ».
Depuis je croise les doigts. Et au cours des prochains jours, je vais guetter fébrilement le moindre message de ma boîte électronique. Je reste optimiste même si pour l’heure, bizarrement, toujours rien.
A suivre…
Bonsoir,
Cela fait un moment que je suis abonnée à votre blog, que j’ai d’ailleurs mis dans mes favoris et c’est seulement aujourd’hui que je m’attaque à sa lecture !!!
Il était temps que je me remette à lire,
Et bien je ne suis pas déçue,
je n’ai qu’un mot MERCI
Oh merci infiniment Ama!!! C’est adorable!! Ce sont ces compliments qui me donnent des frissons de plaisir! Continue à venir nous voir et nous, promis, nous continerons à vous faire sourire… Des bisous!!! <3
Un mot : J’ADORE ?
Moi aussi!!! 😀