La Malle aux Livres noirs

Nos âmes au diable – Nathalie Hug et Jérôme Camut

A la question « Qu’est ce que le pire pour un parent? », Nathalie Hug et Jérôme Camut ont essayé de trouver une réponse. Une, parce que je suppose qu’il y a des pires en nombres indéfinis.

La leur est aussi magistrale que terrifiante.

Quand leur fille Sixtine disparait, c’est la vie de Jeanne et de Richard qui explose. Si lui fait vite preuve d’une certaine fatalité, Jeanne, elle, ne peut accepter l’inacceptable. Sa vie va désormais se résoudre à une seule chose: lutter contre l’idée que sa fille est morte, s’accrochant au moindre espoir, combattant ses pires idées, et imaginant son retour. Même l’arrestation et la condamnation d’un violeur pédophile multirécidiviste ne lui suffit pas. Sa fille ne peut être morte. Point. Elle va essayer d’avancer, au fil des mois, puis des années. Son cheminement la mettra face à une culpabilité qu’elle va devoir affronter comme on affronte sa pire ennemie. Là. Omniprésente.

Sixtine, quant à elle, est enfermée dans une cave sans lumière naturelle, une sorte d’autre monde dans lequel elle va devoir apprendre à vivre, à lutter contre l’abattement et à développer un instinct de survie hors du commun. Proie d’un homme qu’elle ne voit pas et qui semble s’amuser avec ses nerfs, qui semble déterminer à la dresser pour la rendre obéissante à ses exigences… Une petite fille fragile qui va développer une force et une détermination à couper le souffle.

Et puis il y a les autres, ceux qui détournent le regard parce que la situation de Jeanne leur fait peur, et que c’est aussi un instinct de survie de fuir la peur, de l’ignorer, de ne pas la regarder en face. On vit mieux sans peur.

Et enfin il y a les essentiels, ceux qui observent, soutiennent, aident. Ceux qui comprennent Jeanne et essaient de l’aider à leur façon. Qui seront là tout au long de son chemin chaotique et grâce à qui elle tient le coup. Ceux qui seront sa bouée de secours quand elle apprendra le pire, quand elle réalisera quels sont ceux qui ont réellement vendu leurs âmes au diable.

En lisant le résumé de ce livre, j’ai eu un doute quant à ma capacité à le lire. La peur, encore. Celle d’une insupportable identification. Il a attendu sur mon étagère, quelques semaines, avant que le regard de cette jeune femme ne finisse par me convaincre de me lancer. Avec une seule certitude: celle que Nathalie et Jérôme ne m’ont jamais déçue.

Aux passages difficiles succèdent des passages à la limite du soutenable. Le genre d’insoutenable que l’on ne peut lâcher. Parce qu’on veut savoir, comprendre les méandres de la noirceur humaine. Aussi innommables soient elles. A ces passages succèdent aussi les passages où la bonté gratuite de certains hommes ou femmes nous laisse penser que dans ce monde qui vacille, il existe encore des gens bien. Un thriller psychologique qui nous hante bien après l’avoir refermé. Comment continue à vivre avec ça? Comment croire encore aux possibles? Quel sens peut-on véritablement donner au mot « résilience ». Et moi, à la place de Jeanne, j’aurais fait quoi? Je souhaite ne jamais avoir à le savoir. Je ne le souhaite d’ailleurs à personne.

Les auteurs savent frapper là où ça fait mal, mais avec une intelligence telle qu’on en oublie nos premières appréhensions. C’est excellent. Vraiment excellent. C’est noir. Vraiment noir. Et c’est à lire absolument.

Absolument.

Chez Fleuve Editions

Lila sur sa Terrasse

Je suis moi.

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